Le mouvement est en train d’embraser toute la planète. Samedi dernier, des rassemblements avaient lieu dans 900 endroits différents dans le monde. OccupyWallStreet se décline désormais en OccuponsParis, OccuponsMontréal, OccuponsSaguenay… En France, on l’appelle le mouvement des Indignés, appellation qui commence aussi à s’étendre au Québec. L’affirmation que 99 pour cent des gens sur la planète souffrent de la cupidité et de l’avidité d’un pour cent des plus riches d’entre nous sert de mot d’ordre général pour cette « révolution » ! Dans chaque ville, les manifestants définissent les particularités de leur indignation, d’où une apparence globale de confusion et l’impossibilité d’énumérer une liste de revendications claires. Mais ça semble fonctionner et le mouvement est réellement lancé. Qu’est-ce qui pourrait l’arrêter ?
Occupy les autres
La faible reprise qui a suivi la récente crise financière qui a marqué de nombreux pays occidentaux depuis 2008 a peut-être un peu retardé l’instauration d’un mouvement planétaire d’indignation et de colère. En effet, nous sommes tous prompts à défendre ce que nous possédons, notamment notre confort et notre mode de vie. Dès que la crise a semblé se résorber, ici au Canada, nous avons tôt fait de retourner à nos habitudes : se procurer au plus vite le nouveau iPhone ou iPad, le nouveau gadget à la mode, la nouvelle voiture, etc. Consommer, encore…
Pendant ce temps, nous avons assisté, un peu sceptiques, en Égypte, en Tunisie, au Yémen, en Libye et d’autres pays arabes, à la naissance d’une révolution pacifique avec des foules immenses. Le printemps arabe est devenu peu à peu une inspiration pour un grand nombre d’occidentaux insatisfaits de la manière de diriger de nos gouvernements qui laissent se poursuivre l’enrichissement des nantis et la dévastation des ressources par les grandes entreprises. OccupyWallStreet est un modèle nouveau de manifestation avec une organisation et une structure de participation citoyenne originales. Les médias sociaux servent à convoquer des assemblées générales dans toutes les villes où le mouvement se met en marche. Les membres sont ceux et celles qui sont présents et les propositions sont toutes entendues et votées. Il y a véritablement quelque chose de frais et d’inspirant dans ce qui se passe actuellement.
Mais, comme toute forme de manifestations, il y a aussi les dommages collatéraux. Il est difficile de garder le contrôle sur les foules en colère. On l’a vu en Italie et ailleurs, dimanche dernier, alors que des manifestants ont attaqué des banques et un McDo et même saccagé des objets religieux. Pourquoi s’attaquer aux symboles religieux ? Il y a certes à parier qu’en tant qu’institution séculaire, l’Église est mise dans le même sac que les gouvernements et les grandes institutions financières. Ces dérapages se doivent d’être contenus par les organisations et les participants de ce mouvement, car les excès de violence ne sont pas d’augure à susciter l’appui des autres citoyens… La répression est la réaction la plus rapide de ces gouvernements autrement si peu actifs!
Occupy nous autres
Sur un fil Twitter, j’ai été intrigué par une expression qui invitait à s’occuper de nous-mêmes (Occupy yourself!). Cela a fait clic dans ma tête. On ne peut pas simplement s’indigner, protester, casser le système. Il y a quelque chose qui doit commencer par nous-mêmes. À l’émission Tout le monde en parle, cette semaine, Mathieu Roy, le réalisateur du documentaire Survivre au progrès, a démontré à quel point tout est tissé serré. Notre surconsommation est sans doute la principale raison de la fin probable de notre civilisation. En étudiant plusieurs des grandes civilisations disparues, Mathieu Roy a pris conscience que nous étions en train de nous auto-détruire, sans nous en rendre compte, répétant les mêmes erreurs qui ont vu les empires sumérien, maya, romain, etc. disparaître complètement. La civilisation occidentale est sur le point de s’éteindre ! Et nous avec, bien entendu, et l’avenir… Quel cadeau empoisonné pour nos enfants!
Voilà pourquoi j’aime bien cette idée de nous « occuper nous-mêmes » afin de nous mettre en voie de nous convertir d’abord (c’est le mot qui convient) en nous reliant à l’ensemble des citoyens et des citoyennes de la planète qui en ont marre et qui disent un gros NON à ce système qui fabrique des « toujours plus riches » pour quelques privilégiés et des « encore plus pauvres » pour tous les autres. Certains observateurs croient que ce mouvement mondial est le fait de gens naïfs, notamment parce que les revendications et les objectifs ne sont pas établis précisément et que les causes sont multiples. Il est possible que tout ce beau monde rentre peu à peu chez soi, à mesure que l’économie remontera la pente, mais rien n’est si sûr.
Je vois dans ce mouvement un réveil collectif, une utopie d’une incroyable énergie qui fait bouger les masses. Notre monde manque terriblement d’utopies qui permettent à des foules de se mouvoir et d’espérer. Je ne peux m’empêcher de voir dans ce réveil la même espérance qui a fait se lever, 2000 ans plus tôt, des masses de citoyens de tout l’empire romain, « armés » d’une foi indéfectible en un prophète de paix et de justice, et qui ont, peu à peu, mis à mal les fondements d’une société étrangement semblable à celle dans laquelle nous trempons… Verrons-nous quelque chose de nouveau apparaître peu à peu de ce mouvement ? Espérons-le, en y adhérant sans hésiter.
Sur mon blog de philosophie, je viens de publier « On a toujours raison de s’indigner »
http://jeanpaulgalibert.wordpress.com/2011/10/18/on-a-toujours-raison-de-s%e2%80%99indigner
A bientôt, sans doute
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